Dans cette atmosphère économique plutôt morose, la Tunisie a-t-elle d’autres choix que de se repositionner à l’international en s’adossant d’abord sur atouts maitres. Les principaux indicateurs économiques de la Tunisie post révolution battent de l’aile depuis quelques années. La succession des gouvernements, les tentatives de réformes et les initiatives de relance ne semblent pas impacter outre mesure la situation des finances publiques, l’évolution des investissements, la dynamique des exportations et encore moins la question cruciale de la création d’emplois.
Face à la pression de l’emploi, aux attentes des acteurs économiques et aux exigences des bailleurs de fonds, l’économie tunisienne ne parvient pas à retrouver les niveaux de croissance qui lui permettent d’assurer cette transition économique tant souhaitée.
Il est vrai que la visibilité recherchée par les investisseurs de tout bord tarde à s’installer en raison d’un environnement géopolitique régional mouvant et d’un paysage politique, encore à la recherche de ses marques, mais cet état de fait ne peut expliquer à lui seul le comportement d’une économie qui réalisait il ya seulement quelques années des performances saluées par la plupart des partenaires de la Tunisie et des organisations internationales.
Beaucoup a été dit et écrit sur les limites du modèle économique sans qu’une seule avancée ne soit inscrite sur les agendas des institutions et des instances en charge de la chose économique. Les hésitations et les résistances n’ont pas pour autant empêcher l’économie tunisienne d’afficher une résilience certaine à défaut d’enregistrer de meilleures performances.
Le constat est plutôt frustrant quand on procède à une lecture et une analyse objectives des agrégats économiques de l’inflation, du commerce extérieur, des investissements directs étrangers ou encore du chômage.
Et pourtant la machine continue de tourner tant bien que mal assurant un service minimum que d’aucuns considèrent comme un gâchis en terme d’opportunités tant sur le marché local que sur les marchés extérieurs.
En réalité et indépendamment du style de gouvernance imposé par la nouvelle donne politique, les acteurs économiques qu’ils soient institutionnels, publics ou privés ne semblent pas adopter une vision commune avec ses déclinaisons en terme de mobilisation de ressources et de moyens et de synergies orientées sur des objectifs clairs.
Avec sa position géographique exceptionnelle, son tissu industriel diversifié, les qualifications de ses ressources humaines et la qualité de son réseau de relations politiques et économiques, la Tunisie s’est appuyée de tout temps sur un dispositif d’exportations qui aura assuré l’essentiel comme en témoigne le positionnement de certains produits et secteurs sur le marché international. L’huile d’olive, les câbles électriques et électroniques, le textile et habillement en sont quelques exemples.
C’est ainsi que depuis toujours la croissance de l’économie tunisienne, dans ses temps forts mais aussi dans ses moments difficile, aura été tirée par les exportations pour faire de la Tunisie l’un des principaux fournisseurs des marchés de l’UE.
Marchés réputés difficiles mais aussi juteux et prometteurs à plus d’un titre. La provenance des IDE et le flux des touristes européens ne serait elle pas la résultante de cette alchimie qui a fait de la Tunisie un site ouvert sur l’extérieur et bien ancré à l’économie européenne.
On pourra sans doute reprocher à ce modèle sa faible intégration et sa concentration sur une poignée de marchés du sud de l’Europe mais il n’en demeure pas moins qu’il aura permis à des centaines , voire des milliers d’entreprises de toutes tailles de pouvoir accéder à l’activité d’exportation .
Cette mobilisation autour de l’export, et plus généralement de l’internationalisation, et ce cap sur le marché européen semblent céder le pas en raison d’une perte de compétitivité manifeste liée à des comportements individuels et collectifs sans commune mesure avec la logique de la concurrence qui régit le marché.
Une évidence que les institutions en charge de la promotion tous secteurs confondus se seraient appropriées pour ratisser plus large à la quête de nouveaux débouchés à l’exportation, et de nouvelles sources d’attraction d’IDE.
La capitale image construite des années durant au prix d’énormes investissements de promotion, que nos institutions semblent omettre sur les marchés traditionnels ne pourrait pourtant être abandonnée pour des choix de diversification hypothétiques.
Il est vrai que la cartographie des échanges mondiaux et des investissements directs étrangers connait de profondes mutations mais cela ne saurait argumenter les réflexions engagées ici et là pour relooker la structure de la coopération économique et commerciale de la Tunisie.
L’Europe est un partenaire économique stratégique pour de multiples raisons historiques, géographiques, et politiques.
Les négociations de l’Alec apportent un témoignage solide de cette convergence d’intérêts qu’il serait utile et opportun de sauvegarder et de consolider.
L’intégration de la Tunisie à la Comesa est une alternative qui pourrait offrir à terme d’immenses opportunités si toutefois, le dispositif d’appui et le système de production lui auraient réuni les conditions au préalable.
Tous les intervenants, administrations concernées, organismes de promotion, entreprises, banques, transporteurs, services de soutien connexes sont tous logés à la même enseigne pour faire de cet espace une destination privilégiée de nos exportations, mais aussi de notre savoir faire.
La Tunisie y dispose d’ores et déjà d’une image plutôt reluisante qu’elle pourra d’ailleurs monnayer avec ses partenaires européens à la recherche d’alliances sur cette région du monde porteuse de promesses certaines.
Faute de consensus, le marché maghrébin aurait sans doute constitué une bouffée d’oxygène pour l’économie tunisienne .Le cout du « Non Maghreb » estimé par les experts à quelques deux points de croissance prive inéluctablement les acteurs économiques et les milieux d’affaires de la région d’énormes gisements de croissance.
A l’heure des groupements économiques régionaux, le marché commun maghrébin reste une perspective tributaire d’initiatives politiques fédératrices capables de jeter les jalons d’un espace vital pour les générations futures.
Mr Ali Nakai
Membre d’Honneur de notre Chambre